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Le carnet d'Intima

Matières

Qui fabrique encore la célèbre dentelle Leavers ?

Rien parmi les matières textiles les plus précieuses, n'évoque plus le luxe et le raffinement que la légendaire dentelle Leavers. Fabriquée aujourd'hui encore, avec une précision d’horloger, sur les mêmes machines construites il y a plus de deux

Une étoffe à part 

L'harmonie entre ces métiers à tisser, désormais introuvables, et l'habileté des tullistes spécialisés, capables de les régler à la perfection, est un héritage extraordinaire que peu d’entreprises au monde ont su préserver. Longue et compliquée à produire, la dentelle Leavers semble en effet être vouée à disparaître en raison du manque de vocations chez la jeune génération pour un métier de niche très peu connu du grand public. Comparées aux machines à dentelle modernes, les Jacquardtronic et les Rachel, qui tournent à grande vitesse et de manière quasi automatique, les métiers Leavers créent de véritables œuvres d'art.  « La laize, qui est une répétition continue d’un motif de dentelle, met entre 5 et 10 fois plus de temps à être produite. En revanche, les avantages de la Leavers restent la légèreté, la diversité des matières et des couleurs, le relief et, bien entendu, le toucher qui diffère du tricotage dont les nœuds amènent un toucher plus rugueux.» explique Jeremy Visse, Responsable export de chez Solstiss. « Les machines électroniques ne peuvent reproduire la délicatesse, la richesse et la douceur de la Leavers. « Ce sont deux philosophies différentes - renchérit Roman Lescroart, à la tête de  Sophie Hallette et Président de la Fédération Française des Dentelles et des Broderies et de poursuivre- La Leavers est une robe du soir, le tricotage électronique un Tee-shirt. On a besoin des deux, mais pas pour le même usage ! »  

20 étapes de fabrication
Une nouvelle création comprend normalement un bord, un entre-deux, un galon et une dentelle intégrale. Il faut parfois jusqu’à 3 mois pour la produire. Tout commence avec l’esquisseur qui trouve son inspiration dans les nouvelles tendances de la mode ou se plonge dans les vastes archives de ces Maisons historiques. Cet expert doit tout à la fois rechercher beauté et originalité, mais il ne peut aller au-delà des capacités du métier. Son dessin passe ensuite entre les mains d’un technicien, le metteur en cartes, qui traduit l’esquisse sur papier millimétré. C’est une carte d’identité qui montre aux fils la direction à suivre et enlace les méandres du motif.  Ces fils ne peuvent qu’aller de l’avant, car aucune marche arrière n’est possible. Le guide sert à  frapper les cartons jacquard qui créent les motifs.

15 000 fils à surveiller

Pour l’étape suivante, on a recours à des machinistes aux doigts agiles très expérimentés que l’on appelle des « tullistes ». Ceux-ci gèrent le processus de bobinage, la machine à fileter des milliers de fils délicats et font tourner les métiers. Préparer une machine peut prendre plus d’une semaine. Et les jeunes apprentis ont besoin de 3 à 5 ans de formation pour maîtriser parfaitement leur travail. Il est toujours nécessaire de superviser les machines quand elles tournent. Il peut y avoir jusqu’à 15 000 fils à suivre. Il faut surveiller la tension et bien sûr que les bobines ne se vident pas toutes en même temps. Plus la dentelle est riche, plus il y a de fils et plus cela coûte cher.L’écosseur gère l’étape suivante. Il dégage la pièce de métal, appelée bobine, de son support. Puis, il retire le fil restant de la bobine. Le bobineur alimente en fil les métiers. Vient ensuite le remonteur qui charge les bobines dans les chariots…tout en libérant le fil, afin qu’il puisse être noué par la suite.  Commence alors l’inspection. Ce sont souvent des femmes, dites visiteuses, qui repèrent les fils cassés et les points manquants. Elles marquent leurs emplacements pour les réparer plus tard. Les raccommodeuses reprennent à la main tous les défauts. Et cèdent leur place aux coloristes qui plongent les dentelles dans des bains de teinture. Une deuxième opération de visitage et de raccommodage se met en place. Puis, on tranche l’herbage des bordures, on ratisse, on sépare les coupes de dentelles.  A l’étape suivante, on ennoblit le produit, avec des passementeries, des broderies, des sequins, des perles, et pourquoi pas des plumes. A ce stade, il n’y a plus de limite. Le tout est une troisième fois inspecté avant d’être plié sur du carton et enveloppé. Pour en savoir plus encore, n’hésitez pas à visiter le très complet site de Sophie Hallette, qui nous a servi de référence pour cette présentation des étapes de fabrication. Maintenant, nous connaissons dans le détail chaque étape de la fabrication. On ne sera pas étonné que la dentelle Leavers coûte cher ! 

Les débuts anglais

Tout a commencé à la fin des années 1700, alors que la révolution industrielle était à son apogée. À Nottingham, en Angleterre, des entrepreneurs inventifs ont commencé à essayer de trouver un moyen de mécaniser le processus de fabrication de la populaire dentelle et tulle aux fuseaux, qui étaient, à l'époque, noués à la main par des artisans, une industrie florissante à cette époque. La "fausse simplicité" était dans l'air du temps, après le style très chargé et extravagant de la période pré-révolutionnaire et la demande de dentelles plus fines faisait fureur. La mousseline indienne transparente était) aussi populaire que le filet de dentelle – leur transparence était souvent magnifiée par une soie contrastée, pour un effet charmant, délicat et aérien. Un premier métier à tricoter avait déjà été inventé, mais il était inapte à la production de dentelle, car le point en boucle se défaisait, tout comme dans le tricotage manuel. C’est en 1808, que John Heathcoat, âgé de vingt-quatre ans, fit breveter sa machine Bobbin, la grand-mère de tous les métiers à dentelle, qui produisait un filet identique au fond de dentelle aux fuseaux faite à la main. La nouvelle invention de Heathcoat a provoqué une montée en flèche de la popularité du filet en raison de sa plus grande disponibilité et de son prix plus abordable. Au début, cependant, tous les filets fabriqués à la machine devaient ensuite être brodés à la main. En 1813, John Levers améliore l’invention de John Heathcoat et en y ajoutant la technique des cartes perforées mise au point par Joseph Jacquard. Le fuseau mécanique s’adapte pour faire une guipure qui imite les nœuds complexes de la dentelle, faite main du XVIIIème siècle. C’est ainsi que naît le métier Leavers. L’apparition de ces machines produit bien sûr un effet désastreux sur les artisans fabricant manuellement leur dentelle : la vieille dentelle est morte, vive la nouvelle dentelle !

Un chef d’œuvre de mécanique

On a dit très justement que le métier à tisser la dentelle est un triomphe d’ingéniosité, du fait de la multitude de combinaisons possibles. Il faut une précision absolue pour charger des milliers de fils dans le métier Leavers et une force physique considérable pour le faire fonctionner. Machine complexe de la taille d'un char d'assaut, le métier à tisser Leavers comporte une multitude de pièces mobiles. Certains de ces métiers utilisent encore les cartes perforées Jacquard d'origine avec les mêmes motifs vieux d'un siècle. Cependant, le métier à tisser ne fait qu'une partie du travail - le processus de préparation, de production et de finition de la dentelle ne nécessite pas moins de 17 étapes supplémentaires. Chacune de ces étapes doit être supervisée par un professionnel qualifié.
La dentelle était traditionnellement fabriquée en soie et en coton, mais dans les années 1950, l’arrivée des fibres synthétiques a rendu la production plus facile grâce à leur résistance. Puis, au début des années 1980, l'introduction de fibres élastiques a permis d’apporter une bonne tenue et un confort au porter très appréciés pour les utilisations en lingerie. En outre, au cours des vingt dernières années, la CAO (conception assistée par ordinateur) ainsi que les systèmes de contrôle numérique des métiers, ont permis aux dentellières d'accroître leur créativité et leur production. Au fil du temps, la dentelle « traditionnelle » a beaucoup évolué grâce à l'immense variété de matières désormais disponibles et à la création de motifs inédits ; avec des possibilités infinies qu’elle offre, la seule limite est l'imagination du créateur !

Uniques au monde

Autrefois une industrie florissante, du début des années 1800 jusqu'au milieu des années 1900, il y avait des centaines de fabricants de dentelle Leavers en Angleterre et en France - mais ils ont presque complètement disparu. Seule une poignée d'usines spécialisées fabriquent encore la véritable dentelle Leavers. Voici une liste des quelques usines qui subsistent.

Nottingham en Angleterre

Il est difficile de croire qu'il existait autrefois des centaines de fabricants de dentelle à Nottingham et qu'il n'en reste plus qu'un : La Cluny Lace Company, dernier fabricant de dentelle Leavers en Angleterre. La société produit toujours une dentelle traditionnelle, très proche de la dentelle aux fuseaux, souvent réalisée en coton dans des motifs classiques inspirés des dessins originaux issus de leurs archives. Charles Mason, dont la famille possède l’usine de Cluny depuis 200 ans, incarne à lui tout seul la dentelle Leavers anglaise.

Calais et Caudry en France

L'art de la dentelle Leavers française est légendaire. Elle est délicate, élégante, raffinée et intemporelle. En fait, la dentelle est tellement synonyme de savoir-faire français qu'il est difficile d'imaginer que les machines ne sont pas originaires de France et qu'il n'était même pas possible de les importer légalement. Les métiers Leavers ont dû être démontés et passés en contrebande, pièce par pièce, de Nottingham à Calais, où le commerce de la dentelle s'est rapidement développé et a prospéré. La France possède aujourd'hui 80 % des métiers Leavers dans le monde et ils sont tous concentrés à Calais et Caudry, dans le nord du pays.
Il fut un temps où les villes de Calais et de Caudry regorgeaient d'usines employant des dizaines de milliers de personnes qualifiées. Aujourd'hui, il ne reste plus qu'une poignée d'usines de dentelle Leavers en France, avec quelques centaines d'employés qui se consacrent à la fabrication de la dentelle Leavers et à la préservation de l'histoire et de l'âme de la véritable dentelle à la française. Pour rester attractives, ces entreprises se concentrent sur le haut de gamme. Les marques de luxe ont tout intérêt à protéger ces petites entreprises au savoir-faire énorme encore capables de créer du rêve. Les fabricants qui ont survécu racontent des histoires qui s’imbriquent les unes dans les autres. Quelques entreprises ont gardé leurs sites d’origine, d’autres ont fusionné avec leurs anciens concurrents.

André Laude

Un monde d'artisanat, de perfection et de beauté, c’est probablement la plus ancienne usine de dentelle de France. Créée en 1850, elle appartient aujourd’hui à la sixième génération. Elle dispose de 40 métiers Leavers à Caudry et leurs dentelles sont sélectionnées pour les robes de défilés haute couture du monde entier.  

Beauvillaine Davoine

Créateur de dentelle à Caudry depuis 1902, l’entreprise familiale fabrique des dentelles Leavers d'exception depuis plus de quatre générations.

Jean Bracq

L’entreprise est en activité depuis 1889 et incarne une longue tradition familiale qui permet de perpétuer le savoir-faire maison. Soixante-cinq employés s’activent autour des 40 métiers dans leur usine de Caudry pour produire cette « matière exquise faite essentiellement de petits trous. » 

Noyon et Darquer

Les deux grands noms de dentelle de Calais ont récemment fusionné, mais gardent chacun leur identité propre. Créé en 1919, et premier dentellier à employer la fibre élastique, Noyon Dentelle dispose aujourd’hui de 72 métiers Leavers. Etablie en 1840 Darquer a rejoint le groupe Noyon en 1988. Elle dispose de 130 métiers Leavers (dont 109 prêts à tourner) qui produisent le « champagne de la dentelle » comme le rappelle Sébastien Bento Soares, son actuel PDG.

Solstiss

Fondée par un groupe de dentellières françaises en 1974, elle perpétue la tradition avec ses usines datant de 1895. Solstiss possède aujourd’hui 110 métiers, du 7 points aux 12 points, ce qui fait la richesse de la collection de la maison. Synonyme de qualité, de maîtrise et de savoir-faire, elle a été reconnue "Entreprise du patrimoine vivant" en 2011.

Sophie Hallette

La maison Sophie Hallette, en activité depuis 1887, et à sa troisième génération, a acquis et intégré, dans le temps, EuroDentelles, Riechers Marescot et Codentel, trois autres spécialistes français du Leavers qui lui permettent aujourd’hui de disposer d’une offre unique, grâce à la diversité de ses propositions. Elle dispose aujourd’hui du plus grand parc de Leavers au monde avec un total de 180 métiers, dont une cinquantaine réservés à la lingerie, répartis entre Calais et Caudry où se trouve leur principal site de production, La Ramette d'une surface de 16 000 mètres carrés, capable d’accueillir le parc de Leavers et Bobbins caudrésiens du groupe. Intégrée en teinture et finition, Sophie Hallette propose des collections Leavers pour la haute couture, le prêt-à-porter et la lingerie ;  ses sublimes créations se retrouvent chez les couturiers du monde entier et ont été choisies notamment pour la robe de mariée la plus prestigieuse du siècle :  celle portée par la  Duchesse de Cambridge, épouse du Prince William, signée Alexander McQueen.

Italie du Nord

Pizval

Créée en 1965, l’entreprise a acquis avec le temps quelques précieux métiers Leavers et fabrique essentiellement de la dentelle de Valenciennes et de Chantilly pour la haute couture.

Tessitura Colombo Antonio

Fondée en 1960 et spécialiste de la dentelle jauqartonic, l’entreprise s’est lancée dans le Leavers en 2020 avec la marque Valé, qui représente aujourd’hui 10 % de son activité. Elle dispose de 20 métiers et d’une archive d’une centaine de dessins, allant des classiques intemporels, aux créations les plus avant-gardistes. Le gros de la production est destiné au prêt-à-porter de luxe, mais une offre spécifique pour la lingerie sera lancée en 2023.

Asie

Sakae

Née au Japon en 1958, l’entreprise a importé ses premiers métiers Leavers de Nottingham, en Angleterre. Aujourd’hui, elle dispose d’une centaine de machines réparties entre ses deux sites de production en Thaïlande et en Chine, pour une production destinée à la lingerie, au prêt-à-porter et la haute couture.    

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